Revue de lecture : Florbelle, de Jacques Cauda.

L’ouvrage de Jacques Cauda se présente comme un texte assez court (87 pages, y-compris les illustrations), à la fois roman, poème en prose (ou proème), et réflexion philosophique et morale.

L’ouvrage est dans la droite ligne du projet sadien, qui, rappelons-le, est de « divulguer tous les caprices, tous les goûts, toutes les horreurs secrètes auxquels les hommes sont sujets dans le feu de leur imagination. » (Les Cent Vingt Journées de Sodome, p. 236). Cependant, c’est aussi ici que réside une différence essentielle, et que Cauda est en fait plus proche de Rousseau que de Sade. En effet,  les caprices, goûts, et horreurs secrètes en question sont chez Cauda ceux de l’auteur lui-même, alors que Sade vise à l’universalité. En ce sens, Florbelle se rapprocherait plutôt des Confessions de Rousseau.

Jacques Cauda avoue sa vérité. Il faut bien voir qu’il le fait honnêtement, sans aucun fard et aussi avec un grand courage. Mais il s’agit plutôt de psychothérapie que de fiction et de thérapie tout court, au sens où l’entend Sade, qui lui veut nous parler de l’homme, pas de lui-même, et même s’il se prend lui-même comme modèle (comme aussi Montaigne).

Dans le préambule du roman, Sade explique que son projet est « de raconter avec les plus grands détails, et par ordre, tous les différents écarts de la débauche, toutes ses branches, toutes ses attenances, ce qu’on appelle en un mot, en langue de libertinage, toutes les passions. (Ibid., c’est moi qui souligne), et il vise donc déjà à peindre tous ces « bizarres penchants » que nous inspire la nature (comme tel est l’épigraphe de Justine et de Juliette). Pour ce faire Sade attribue à autrui (à ses personnages) les passions en question : elles sont celles de l’homme, où celles de Cauda restent les siennes, même bien entendu si son ouvrage participe de la même philosophie !

Ajoutons que l’écriture en est brillante, et la culture, vaste. Il y a des pensées profondes, et de très beaux poèmes. (Mon favori est celui sur la mère, Chère maman sais-tu l’exaltation des selles, pp. 54-56). On y retrouve du Rimbaud, notamment dans la détestation de la mère (La Folcoche, la folle et cochonne de Rimbaud), du Baudelaire, et bien entendu, Sade.

Norbert Sclippa

College of Charleston, S.C., le 28 décembre, 2023.

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