Passions

« Et pourquoi donc empêcher de souffrir l’objet dont la douleur augmente nos jouissances ? » réfléchit Saint-Florent, à l’occasion du viol de Justine. Il y a le particulier, et il y a le général. Lucrèce signale ce plaisir dans celui de voir depuis la terre ferme des gens lutter contre une tempête en mer, ou le spectacle de deux armées se battre depuis une hauteur (mais sans doute qu’il n’y aurait pas non plus de plaisir dans la guerre s’il n’y avait pas aussi celui de tuer). L’argument va au cœur de ce qu’on a coutume d’appeler le sadisme, le plaisir dans la douleur d’autrui. Ce qui ne signifie pas qu’on soit sadique. En effet, il suffit  d’aller quelques lignes de plus (sept, exactement), pour lire également ceci : « Ô homme ! te voilà donc, quand tu n’écoutes que tes passions ! » (Pléiade, II, 466), une remarque qui situe celle de Saint-Florent dans une nouvelle perspective, celle de la passion et de la nature humaine. Sade ne dit pas que c’est une bonne chose, si la douleur d’autrui augmente notre plaisir, mais que tel son effet dans la passion. C’est la passion qui explique la question de Saint-Florent, se rendant compte qu’elle va souffrir, alors que son désir de jouir d’elle est plus grand que cette considération. Le commentaire de Sade n’est plus dans son constat, mais dans le second fait par lui-même, la considération, et la peinture des passions qui est son véritable sujet. L’homme n’a pas le choix dans la passion d’écouter ou pas la voix de la raison, et qui pis est et d’autant comme nous le savons que les passions sont toutes nécessaires à la nature.

This entry was posted in Uncategorized. Bookmark the permalink.

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *