Tout le savoir de l’humanité ne servirait à rien s’il n’avait pas de limite, et cette limite, c’est le moi. Le moi est ce qui délimite que « tout est vérité en deçà, erreur au-delà » alors qu’il n’y a aucune limite, pour les deux, aucune limite pour la vérité, aucune pour l’erreur. C’est aussi ce qui fait que Pascal est souvent si proche de Sade. Le gouffre, l’abîme dont Pascal avait peur et qu’il voyait toujours à côté de lui, existe bien, il est en lui. Il est cet espace infini dont le silence l’effrayait, que Sade anime, et auquel il donne une voix. Cet espace est celui du moi et de la vérité du moi. Lire Sade, c’est ainsi comprendre que tout est erreur au-delà qui devient vérité en deçà, et comment cette limite ne peut pas être franchie, sans que l’un se transforme en l’autre, et vice-versa (qui est la base de la souveraineté individuelle). Seule l’intériorité absolue garantit en effet l’extériorité absolue. Sade anime le jeu de cette réalité, de ses deux côtés : il faut un abîme de non-être pour créer un abîme d’être (et vice-versa).